LE GRAND SOIR, Gwenaël Bulteau : Yvon

LE GRAND SOIR, GwenaëlBulteau
Éditions La manufacture de livres, 282 pages
Broché, 20€90
Parution : 6 octobre 2022

Gwenaël Bulteau est l'auteur multiprimé de La République des Faibles qui a rencontré un certain succès en 2021, il nous livre ici son second roman. Attention, ne vous attendez pas à un roman historique traditionnel, comme je l'ai cru. Bien sûr, nous sommes en 1905-1906... mais il s'agit d'un roman social... ou sociétal. Comme on veut.

Tout commence le 22 janvier 1905, au cimetière de Levallois-Perret. On enterre "La Louve", Louise Michel l'égérie de la Commune de Paris en 1870-1871. La foule est immense, prolétaire, ouvrière... cernée par la police. Jeanne est là, jeune bourgeoise en rupture avec sa famille qu'elle rejette violemment. Jeanne ne sait pas qu'elle vit son dernier jour...

Un an plus tard,  c'est Lucie sa cousine qui part à sa recherche.  Lucie,  elle aussi,  vit mal le carcan des "bonnes familles". Et cette quête est une façon de s'en libérer. Gwenaël Bulteau nous entraîne à la suite de Lucie dans le milieu révolutionnaire, ouvrier : celui des Rouges. Mais aussi celui des bas quartiers miséreux de Paris ou de Lens où la catastrophe minière de Courrières agite les esprits. Une grève dure y oppose les mineurs de fond  misérables à leurs patrons-exploiteurs-bourgeois. Soutenus par la police et l'armée envoyées par Clémenceau,  ils savent qu'ils auront la peau de ceux qu'ils méprisent. Le paradis des riches se bâtit sur la souffrance des pauvres, disait Victor Hugo. 

L'auteur brosse un portrait peu reluisant de la France de 1906. Voyous, "apaches", ouvriers miséreux,  femmes méprisées, exploitées. Le roman est ancré dans la réalité par ses personnages révolutionnaires, héritiers de la Louve, un peu ou complètement oubliés aujourd'hui. Qui se souvient de la citoyenne Sorgue ? du Dr Pelletier?

L'enquête de Lucie et celle de Leroy, secrétaire très particulier de Sorgue, trouveront une conclusion très noire... Le Grand Soir n'est pas pour tout de suite. Et la Grande Guerre n'est pas encore passée par là.  

Mépris machiste policier sur la condition des femmes, patriarcat... peu d'entre elles ont la force ou la possibilité de se révolter.  On pourrait être en 1850 et les Misérables ne sont pas loin. Personne n'est épargné,  la noirceur règne.  Seule peut-être Lucie  (la lumière,  étymologiquement parlant) émergera de ce cloaque...

La plume de Gwenaël Bulteau est revendicative et elle ne laisse pas indifférent.  Elle m'a touché plus que je ne le pensais. Ses personnages ne m'ont pas quitté de sitôt. 😉

Merci à La manufacture de livres pour ce service de presse qui a bousculé mes habitudes de lecture d'une manière tout à fait salutaire !



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