TORTUE, GRAND ROSEAU ET PETIT CLOU, Anne Terral : Yvon
TORTUE, GRAND ROSEAU ET PETIT CLOU
Texte : Anne Terral
Illustrations : Géraldine Alibeu
Editions Les Fourmis Rouges
Album cartonné (17x24) 40 pages
Parution : 19 avril 2024
Etrange titre, vous ne trouvez pas ? mais c'est la couverture qui a attiré mon œil d'abord. Ici le choc visuel se continue à l'intérieur et il se double de la découverte d'un beau texte sur un sujet difficile à traiter pour les enfants : le travail de deuil. J'ai croisé sur les réseaux plusieurs demandes à ce sujet et je crois avoir trouvé la réponse. Je vous explique.
Tortue est vieille, très vieille. Elle sent bien que c'est la fin. Alors elle fait le tour de son île pour dire adieu à tout ce qu'elle aime et puis elle invite ses amis pour leur offrir un souvenir. A Castor ce sera deux morceaux de tissu. Pour Loutre deux baguettes de bois. Pour Crapaud une clochette en terre cuite. Et pour Pô, le jeune fils de Crapaud qui ne veut pas qu'elle parte, un grand roseau et un petit clou. Pô ne comprend pas. Et puis Tortue s'endormira mais ne se réveillera pas.
Alors, sur la plage, confiant leur amie aux flots, tous viennent lui dire adieu. Il y a des larmes et le silence, puis l'absence. Vient ensuite la période où chacun pleure dans son coin, celle où on croit apercevoir celle qui n'est plus là. Puis on reparle d'elle, des bons moments passés ensemble, le temps passe... Et un jour, en parlant de Tortue on sourit, on rit même. Et on peut dire le mot qu'on s'interdisait : mourir. Pô à ce moment comprend le sens des cadeaux de Tortue dans sa grande sagesse, il appelle les autres et cet album de deuil finit sur la Vie qui revient et qu'on célèbre grâce à Tortue qui de là-haut fait scintiller la plage pour eux.
De grandes illustrations pleine page ou double-page qui rendent justice au beau travail (à la gouache, semble-t-il) de Géraldine Alibeu accompagnant un texte assez bref mais d'une justesse et d'une sobriété parfaites sur les ressentis et ce qu'on montre aux autres ou pas. Un texte qu'il faudra lire à l'enfant s'il est très jeune, en prenant son temps pour que cela "fasse sens", comme on dit. Des pages colorées, exotiques (il y a même une mangrove), des teintes mates sur un papier et une couverture qu'on a plaisir à toucher. Ne cherchez pas un documentaire animalier, Tortue est mi-humaine, ce qui aidera l'enfant à l'identifier à celui ou celle qui n'est plus là. Les amis aussi ne font qu'évoquer ce qu'ils sont, et c'est bien.
Une fois achevée la lecture, on prend plaisir à revenir au début, retrouver Tortue, comprendre mieux son message. Admirer encore la beauté des décors, les couleurs, revivre la tristesse, la sérénité avant la gaieté revenue. Oui, on a le droit d'être encore joyeux, cela ne signifie pas qu'on oublie.
Et puis, de tout là-haut, Tortue veille sur ses amis ... et le sable scintille.
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