LE DERNIER GARDIEN D'ELLIS ISLAND; Gaëlle Josse (Yvon)
LE DERNIER GARDIEN D'ELLIS ISLAND; Gaëlle Josse
Editions J'ai Lu; 187 pages
Exemplaire hors commerce offert par Lire en Poche Gradignan
Ellis Island, c'est la Porte Dorée, celle qui permit pendant des décennies à
des millions d'immigrés d'entrer aux USA, ces émigrés d'Europe pour la plupart
et qui ont fait par leur force de travail la richesse de ce pays. Un Eldorado ?
Pas vraiment. On va le voir.
Ellis Island, 1954, neuf jours avant la fermeture définitive du lieu. Le
directeur John Mitchell confie à son journal intime ses souvenirs en attendant
ceux qui vont venir déménager archives et mobilier maintenant que plus personne
ne passe par cet ilot si près de la Statue de la Liberté.
Un personnage touchant, bouleversant même. Un homme qui a consacré sa vie à son
métier et qui est un peu passé à côté de la sienne. Dans neuf jours, il sera
mis à la retraite et partira vivre en ville dans un minuscule appartement,
celui de ses parents, comme figé dans le temps. John Mitchell a perdu la
lumière de sa vie, sa femme Liz, morte très jeune. Bouleversant amour que
Gaëlle Josse nous raconte en quelques pages de ce bref roman. Bref mais fort. Parce que cet homme a aussi des remords et des regrets. Ceux qu'il n'a pas pu
aider et celle qui le hante. Nella l'Italienne au destin tragique, Nella fille
d'un "jettatore", Nella la coupeuse de feu, Nella si belle pour qui
il a craqué.. et il a honte à cause d'elle. Et puis il nous parle de ses
collègues, de son équipe, de ces si nombreux passagers, lui qui a refusé toutes
les promotions pour rester sur cette ile.
Après l'épouvantable difficulté de la traversée, la promiscuité, la maladie, le
danger, la mort parfois, c'est une vie de travail acharné qui attendait ceux
qui pensaient arriver au Paradis. Mais John se sent parfois traître à son pays,
à sa mission, il se reproche des choses. Il a des torts, mais c'est un homme.
Avec ses défauts, ses désirs, ses erreurs mais aussi un homme plein d'empathie.
D'humanité.
187 pages bouleversantes qui commencent comme un constat et qui au fil de ces
neuf jours nous racontent Ellis Island à la fois lieu de passage, hôpital,
prison, cimetière. Les erreurs de John, celles d'une administration rigide et
bêtement anti-communiste primaire. C'était une tout autre époque. Elle s'achève
en 1954. Depuis Ellis Island est devenue le musée de l'immigration. On y
trouve une extraordinaire collection de photos de tous ces gens venus pour
échapper à la pauvreté, la dictature, la guerre parfois, qui ont quitté pays et
famille pour ne jamais revenir. Alors il y eut quelques refoulés (très peu) et
puis tous ceux qui une fois lâchés dans la ville qui ne dort jamais ont
disparu. Réussite ? Echec ? John aimerait savoir, et ne pas savoir.
Un roman bref et poignant. Des personnages qui restent en mémoire. John et Liz,
Nella et son frère, l'étonnant Lazzarini et les autres... tous les autres...
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